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A la base, ce n’est pas ce roman-là de l’auteure que j’avais sur ma wishlist. Mais le sujet traité y était exactement le même : des actes sexuels entre un garçon et une fille, sentiment amoureux d’un côté, celui d’avoir été violée de l’autre. Et le fait qui m’a précisément attiré est que le narrateur était le garçon.
La quatrième de couverture
La soirée s’annonce bien pour Rodrigues : fête de la musique, bière et rock’n’roll… Et puis ce concert avec Aurélie, qui semble ne chanter que pour lui. Des regards qui s’échangent, l’alcool qui aide, des envies plein les yeux… Une nuit qui tient ses promesses.
Rodrigues est heureux.
Jusqu’au lendemain matin, où le cauchemar commence…
21 juin
Journée trop longue. Je tourne en rond. Toutes les deux minutes, je regarde ma montre, comme si le temps ne passait pas »
Mon avis
Au départ, je n’étais pas forcément convaincue d’avoir grand chose à dire sur ma lecture une fois que celle-ci serait terminée. Mais avec du recul… Commençons par le commencement !
Il s’agit d’un livre jeunesse, et je pense que ce détail fait la différence. J’ai eu l’impression d’avoir entre les mains un petit guide explicatif de ce qu’est la justice pour mineur. Tout est très bien présenté, on sent le travail de l’auteure en amont. Bon clairement, je vais pas vous mentir, on crame à 8000 quand un personnage part en monologue explicatif, que c’est à destination du lecteur inexpérimenté. Vous avez même parfois de véritables placements de produits, notamment celui sur le RapeX. Pour les curieux, c’est un préservatif anti-viol, je vous laisse aller jeter un oeil sur Ecosia, Google.. ce que vous voulez, pour savoir ce que c’est. Mais croyez-moi, vous n’êtes pas prêts pour ce que vous allez découvrir haha!
Je m’égare. Donc le côté roman initiatique qui passe bien, parce que c’est un roman jeunesse. Ensuite, le côté ultra-réaliste de la société qui est dépeint. De la société et surtout des individus qui la composent. Rien n’est jamais tout blanc ni tout noir, je crois que c’est avec mes études de droit que je l’ai appris le plus. Le viol tel que décrit par les textes de loi, ça n’a pas l’air évident. Mais la vie, ça ne se passe jamais comme dans les textes. Le contexte complique tout, et si la vérité des uns et des autres ne se recoupent pas, cela ne veut pas forcément dire que l’un des deux ment. Le roman est pour cela, bien ficelé. Il n’est pas là pour nous dire qui a raison, qui a tort. L’auteure amène un sujet, le pose comme pour lancer un débat, et le clôt parce qu’il faut bien le clore, toutefois le coeur du sujet n’est pas dans la solution mais dans la réflexion amenée.
Bon par contre, il y a quelque chose que je ne peux pas laisser passer. C’est la plaidoirie de l’avocate de la défense. Ohmondieu le carnage. Il faut savoir que dans mes romans, j’aime me placer du côté des coupables, pour les comprendre et bien souvent les plaindre (cf La Tanche, âme sensible s’abstenir). Mais là, l’avocate, je serai bien rentrée dans le bouquin pour lui faire ravaler chacune des paroles prononcée. Pire défense EVER. Quoiqu’au final, je conserve ma ligne de conduite : je plains Rodrigues, l’accusé, pour être si mal entouré. Parce que ce qui vaut pour l’avocate vaut pour la mère : agaçante et égoïste au possible.
Mise à part ce petit coup de gueule, je conseille vivement ce bouquin, aux jeunes et aux moins jeunes. A ceux dont le discours se résume à « qu’on les foutent en taule, mineur ou pas mineur, quelle importance puisque c’est un délinquant ».
Ce que j’ai aimé relever
Promis, je ne vais pas me lancer dans mon plaidoyer contre les conditions carcérales mais… comment peut-on voir la prison telle qu’elle est aujourd’hui comme une réelle solution ? Rodrigues découvre ce monde de violence, et les seuls conseils que lui prodiguent l’avocate (encore elle), surveillants et médecins de l’établissement ? S’endurcir et apprendre à se défendre voire à rendre les coups. Voilà voilà.
Le petit cours de mythologie grecque offert par Wall, un autre détenu mineur. Il parle d’Eris, sœur d’Arès. Si celui-ci est le dieu de la guerre, celle-là est la déesse de la discorde. Tous ses enfants seront des symboles de fléaux. A une lettre près, c’était Eros, dieu de l’amour. Mais sans modifier les lettres, vous avez ERIS, pour Équipes régionales d’intervention et de sécurité. Une sorte de GIGN de la pénitentiaire, redoutable d’efficacité (et l’efficacité a toujours un prix).
Faites gaffe, je crois qu’ils spoilent le film Thelma et Louise à un moment. Je dis bien je crois, car personnellement je ne l’ai jamais vu, donc je ne sais pas si la référence était une partie importante ou non du scénario.
Quelques citations
◊ Je suis con damné, tu es con vaincu, nous sommes con cernés mais heureusement les cons servent.
◊ Deuxième fouille. Mon corps comme une forteresse blindée. Ne pas sentir les mains qui palpent. Mais c’est trop dur. Ma carapace se fendille de tous les côtés. Je n’ai pas de protection contre l’humiliation.
◊ Des rires en cascade se répondent, s’entraînent et rallient les suiveurs, ceux qui pissent dans leur froc à l’idée d’avoir à justifier leur neutralité.
•Ma note : 7/10•