Gail Honeyman – Eleanor Oliphant va très bien

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J’avais vu passé ce roman sur bookstagram l’an passé, ou celui d’avant encore je ne sais plus. Je savais qu’il pourrait me plaire, car il me rappelait énormément une excellente lecture que je ne dois qu’à un extrême hasard : Tu pourrais rater intégralement ta vie

 

 

La quatrième de couverture

Eleanor Oliphant est un peu spéciale.
Dotée d’une culture générale supérieure à la moyenne, peu soucieuse des bonnes manières et du vernis social, elle dit les choses telles qu’elle les pense, sans fard, sans ambages.
Fidèle à sa devise « Mieux vaut être seule que mal accompagnée », Eleanor évite ses semblables et préfère passer ses samedis soir en compagnie d’une bouteille de vodka.
Rien ne manque à sa vie minutieusement réglée et rythmée par ses conversations téléphoniques hebdomadaires avec « maman ».
Mais tout change le jour où elle s’éprend du chanteur d’un groupe de rock à la mode.
Décidée à conquérir l’objet de son désir, Eleanor se lance dans un véritable marathon de transformations. Sur son chemin, elle croise aussi Raymond, un collègue qui sous des airs négligés, va lui faire repousser ses limites.
Car en naviguant sur les eaux tumultueuses de son obsession amoureuse et de sa relation à distance avec « maman », Eleanor découvre que, parfois, même une entité autosuffisante a besoin d’un ami…

 

« Quand les gens me demandent ce que je fais – les chauffeurs de taxi, les hygiénistes bucco-dentaires-, je leur réponds que je travaille dans un bureau. En près de neuf ans, personne n’a cherché à savoir de quel genre de bureau il s’agissait, ou quelle sorte de travail j’y faisais. »

 

Mon avis

On comprend bien vite que Eleanor est hantée par des démons qu’elle a toujours repoussé en menant sa triste et monotone vie bien organisée à coup de bus-boulot-vodka. La solitude, le besoin de plaire à une mère, aussi toxique que soit celle-ci. Tout est dévoilé par petites doses, et je n’ai jamais eu le sentiment d’être pressée de savoir enfin la vérité. Déjà, parce qu’il n’est pas compliqué d’en deviner une bonne partie, mais surtout parce que ce qui importe vraiment, c’est le chemin parcouru pour s’en sortir.

Alors on se laisse embarquer avec Eleanor, dans ce quotidien qui va se trouver être bousculé par des rencontres et des hasards de la vie. Tout ce qu’elle a toujours fui, en somme. Je ne résiste pas à l’envie d’une petite comparaison avec un personnage de The Big bang theory. Je vous vois venir, et je vous arrêt de suite : elle n’est pas une Sheldon de plus ! Non, pour moi, elle est clairement la mère de Léonard, aux propos plutôt acerbes mais qui, en toute objectivité, ne sont ni faux, ni même contraires à ce que voudrait la bienséance. Et c’est un point qui m’a bien fait rire à plusieurs reprises, lorsqu’elle trouve que ce sont les autres qui ont des difficultés de contact et de relationnel. Elle ne se  considère pas comme étant la source de la gêne des autres et c’est tant mieux, car il est vrai que son comportement courtois est irréprochable. Aussi antipathique qu’elle puisse paraître aux yeux de la société et parfois du lecteur, il y aura des moments où elle vous surprendra. Elle peut être d’une générosité à vous fendre le coeur, lorsqu’elle apprend qu’autrui passe par une période difficile qu’elle a été elle-même amenée à connaitre. Non pas dans ses actes, mais à tout le moins dans ses pensées : « Je ne souhaitais cela à personne. Je l’aurais volontiers déchargée de ce fardeau, si j’avais pu. J’étais sûre que je ne le sentirais presque pas par-dessus celui qui m’écrasait déjà ».

Après, j’avoue qu’il y a eu quelques micro-petits-infimes détails qui m’ont fait tiquer. Comme si ça n’allait pas avec la Eleanor que l’autrice nous présentait jusqu’ici. Bon, y’en a si peu que je peux même vous les lister direct ici : elle craint que ses collègues ne la voit rejoindre Raymond, du service info. Je trouve ça étrange qu’elle se préoccupe des qu’en dira-t-on. Second étonnement (je vous avais bien dit qu’il y en aurait peu) c’est lorsqu’elle voit pour la première fois un écarteur dans l’oreille du barman, et qu’elle comprend immédiatement l’utilité. De la déduction j’imagine, mais juste pour vous dire que moi, j’ai buté dessus.

Je laisse le personnage très réussi, et me penche un peu sur l’écriture. Sur un détail dans l’écriture du moins, car j’ai jamais su analyser ou décrire valablement les « plumes » d’auteurs/trices comme on dit. Bref, ce que je voulais dire, c’est que les quelques mises en page ont eu leur petit effet sur moi. Je pense que cette grande page blanche, avec en son centre la répétition du mot menteur va me rester longtemps en mémoire. Quelque part, ça m’a aidée à me projeter instantanément dans les baskets chaussures à attaches Velcro de Eleanor. Puis, bien plus loin dans le roman, on arrive sur la deuxième partie. De nouveau une page vierge avec un titre en son centre. « LES MAUVAIS JOURS ». Ca m’a fait un petit choc en tombant dessus. C’était inattendu, d’autant plus que j’avais jusqu’ici oublié que la première partie s’intitulait « LES BONS JOURS ». Comme si on n’a conscience des jours indolents qu’à l’arrivée, sans crier gare, des difficiles.

Conclusion : bah génial. Comme Eleanor, et au sens réel et premier du qualificatif « génial ».

 

Ce que j’ai aimé relever

Elle a pesé ses seins sur la balance de cuisine. Détrompez-vous, je ne suis en aucun cas choquée de l’acte. Ce qui me choque, c’est d’apprendre que ma copine du collège n’était pas la seule personne au monde à avoir effectué cette étrange expérience.

La petite crise de Sammy sur ce qu’il est advenu du service public de distribution du courrier. Ca m’a fait sourire de voir que cette déperdition écossaise a malheureusement son homologue français chez La Poste (et je ne parle pas des simples problèmes de courriers perdus/abimés. Je parle du relationnel que ma maman factrice a vu peu à peu disparaitre à regret, faute d’une gestion efficace du personnel et de leurs tournées. C’était tout pour moi).

Quand l’idée traverse Eleanor de se faire tatouer, elle a la même réflexion que j’ai à ce sujet : l’emplacement idéal serait une partie relativement secrète du corps. Pour moi, ça permet de conserver le côté personnel et intime du tatouage, en maintenant la volonté qu’il soit montré, à un moment ou à un autre, provoquant une surprise encore plus grande chez celui qui a la chance de l’apercevoir.

Elle établit un corollaire entre l’arrivée de la gêne de chanter en public, et la baisse de la fréquentation des églises. Et je trouve ça pas con du tout.

On peut désormais signaler à notre chère Mademoiselle Oliphant que son souhait de recourir à des funérailles proenvironnementales a été entendu, même s’il n’est pas question de donner un corps en pâture aux animaux carnivores des zoo cela dit comme elle comptait en soumettre l’idée à WWF.

Le mot « Halloween » n’est jamais que la contraction de All Hallow’s Eve = la veille de la Toussaint.

 

Quelques citations 

◊ Je n’ai pas de problème pour m’endormir, c’est une règle que je m’impose.
◊ En dehors des services sociaux, des compagnies de gaz et d’électricité, il arrive qu’un adepte d’une Eglise quelconque vienne me demander si je suis prête à laisser Jésus entrer dans ma vie. A ma grande déception, je me suis aperçue qu’ils n’aimaient pas discuter du concept de prosélytisme. 
◊ Elle s’est tue, l’air soudain empruntée, triste, embarrassée. Ah, la fameuse Sainte Trinité des expressions dédiées à Oliphant. 
◊ Prise d’une impulsion soudaine, je me suis penchée et j’ai posé ma joue (pas celle qui est couverte de cicatrices, la normale) contre la sienne. Ce n’était ni un baiser, ni une accolade, mais la seule forme de contact dont j’étais capable. 
◊ Le barman, qui mesurait un bon mètre quatre-vingts, avait percé ses oreilles de trous énormes avant d’y insérés des petits disques en plastique noir pour les agrandir encore. Pour une raison inconnue, j’ai pensé à mes rideaux de douche. 
◊ Certains êtres, les plus faibles, redoutent la solitude. Ils ne réussissent pas à comprendre qu’elle peut être très libératrice ; une fois qu’on réalise qu’on n’a besoin de personne, on devient capable de prendre soin de soi-même. 
◊ A présent, mes jambes étaient noires et mes cheveux étaient blonds. J’avais allongé mes cils et ombré mes paupières, poudré mes joues d’un nuage rose, et étalé sur mes lèvres une couche d’un rouge sombre que l’on ne trouvait guère dans la nature. Je devais donc, en toute logique, paraître moins humaine que jamais, pourtant mon apparence n’avait jamais été plus convenable, plus appropriée à ce monde, me semblait-il. 

 


•Plaisir de lecture : 9,5/10•

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